Le FORMINDEP a soulevé auprès du Président de la Haute Autorité de Santé (HAS) une problématique de conflits d’intérêts concernant les recommandations éditées par l’institution sur la prise en charge des hypothyroïdies publiées en décembre 2022. La réponse de l’HAS ne convainc pas.

Des conflits d’intérêt non déclarés par les experts

Nous avons constaté une discordance entre les déclarations publiques d’intérêts de certains membres de groupes de travail de la HAS (« Prise en charge des hypothyroïdies chez l’adulte », validé par le Collège le 15 décembre 2022) et les déclarations présentes dans la base Transparence santé. Une différence de près de 20 000 €.

En particulier, en ce qui concerne les chargé.es de projet :

  • Manuel Sanchez (chargé de projet, médecin gériatre), ne déclare pas, dans sa DPI de décembre 2022, 16 conventions (pour un montant de 1802 euros) retrouvées dans les 5 dernières années sur la base Transparence Santé.
  • Léa Demarquet (chargée de projet, endocrinologue), ne déclare pas, dans sa DPI de septembre 2022, 54 conventions (pour un montant de 7328 euros) dans les 5 dernières années, et en particulier trois « avantages » (pour un montant de 178 euros) déclarés sur la base Transparence Santé par la société SANOFI (qui commercialise des produits prescrits dans les dysthyroïdies).
  • Camille Buffet (chargée de projet, endocrinologue) déclare dans sa DPI de décembre 2021 quatre conventions avec les sociétés LILLY et EISAI, mais ne déclare pas 29 conventions (pour un montant total de 10373 euros) dans les 5 dernières années, et en particulier avec la société MERCK (pour un montant de 128 euros), et avec la société SANOFI (pour un montant de 1548 euros), déclarés sur la base Transparence Santé, ces deux dernières sociétés commercialisant des produits prescrits dans les dysthyroïdies.

Même si certains montants restent relativement modestes, leur absence de déclaration jette inévitablement un doute sur la transparence de la démarche et l’indépendance des experts ayant participé à la rédaction de ces recommandations.

Par ailleurs, il nous a semblé pour le moins étonnant que des chargés de mission responsables d’un groupe de travail à l’origine de recommandations puissent avoir des liens financiers avec des entreprises commercialisant des médicaments présents dans ces recommandations.

Le Président de la HAS ne semble pas s’en soucier

Contacté par notre association en avril 2023, le Président de la HAS nous informe que « le Comité de Validation des Déclarations d’intérêts (CVDI) analyse les liens d’intérêts des personnes participant aux travaux de la HAS sur la base d’une pré-analyse effectuée par les services de la HAS, du formulaire de saisine, des déclarations d’intérêts et de la fiche extraite d’ADEX », et que l’analyse des dossiers objets de notre courrier d’avril 2023 « a été effectuée par le CVDI en conformité avec le guide de déontologie ».

Même si l’analyse du CVDI peut être un filtre efficace au regard de potentiels conflits d’intérêts, cette double problématique (liens financiers persistants avec des entreprises pour lesquelles les recommandations peuvent avoir un impact sur leur activité ; et caractère incomplet de certaines déclarations d’intérêts, malgré l’obligation réglementaire.) nous semble de nature à jeter une ombre sur tout le protocole.

Nous interpellons le déontologue

La réponse du Président de la HAS (juin 2023) ne répond pas à nos interrogations, et nous lui avons signifié notre désaccord, sans réponse de sa part à ce jour . Nous avons donc sollicité ce jour le Déontologue de cette institution pour obtenir une prise de position à ce sujet, et nous nous permettrons de partager les informations qui en découleront.

Pour rappel, le Formindep avait déjà interpellé la HAS concernant des conflits d’intérêt cachés dans certaines recommandations, avec au final abrogation de ces dernières soit par la HAS elle-même soit par le Conseil d’Etat : en 2011 et 2018.

Notre courrier au président de la HAS en avril 2023 : courrier.

La réponse du président de la HAS : courrier.

Notre réponse en juillet 2023 : courrier.

Notre courrier au déontologue : courrier.