Former à l’indépendance à l’université, ça marche !

Protéger les étudiants en médecine des firmes améliore leurs futures prescriptions

Il s’agit d’une étude importante sur l’influence de l’industrie pharmaceutique auprès des étudiants en médecine. Aux USA bien sûr. Puisqu’en France tout va pour le mieux.

Tout cela est publié dans le British Medical Journal en date du 31 janvier 2013, Medical school gift restriction policies and physician prescribing of newly marketed psychotropic medications : difference-in-differences analysis
accompagné d’un éditorial du 20 février 2013, Drug company gifts to medical students : the hidden curriculum.

Jusqu’à présent, un petit nombre d’études avaient montré que l’exposition des étudiants en médecine aux cadeaux et autres relations intéressées des firmes pharmaceutiques, modifiait le jugement des étudiants dans le sens d’un a priori favorable aux firmes, susceptible de les influencer et d’induire des prescriptions inappropriées.

Cette fois, il s’agit d’une étude qui montre qu’une politique de formation et de restriction des conflits d’intérêts liés aux firmes a de l’influence sur les prescriptions des étudiants devenus médecins.

Les auteurs ont comparé des étudiants qui, dans leur université, avaient reçu une formation sur les influences industrielles et en avaient été protégés, avec d’autres étudiants des années précédentes qui n’avaient pas reçu cette formation.

Ils ont étudié les comportements de ces étudiants devenus médecins quelques années plus tard, face à la prescription de certains médicaments.

Intelligemment, les auteurs ont choisi des “nouveaux” médicaments qui n’apportaient rien de nouveau, selon l’expression consacrée par Prescrire. En l’occurrence une “nouvelle” amphétamine, un “nouvel” antidépresseur dérivé de la venlafaxine, un “nouvel” antipsychotique.

Résultat : les étudiants formés prescrivent moins ces médicaments inutiles, et ce de façon très significative.

Conclusion : former à l’indépendance, ça marche.

Cela permet de réduire les prescriptions inutiles et dangereuses, et donc de réduire le risque sanitaire lié à ces prescriptions sous influences.

Alors que ces formations deviennent peu à peu la norme dans les universités étatsuniennes, au point de permettre la réalisation de telles études, en France, aucune université n’a instauré ce type de politique auprès de ses étudiants. Il est vrai que chez nous les prescriptions médicamenteuses sont rationnelles, appropriées et à l’abri de toutes influences, les médecins français étant ces surhommes naturellement imperméables à toute corruption. Chez nous pas de Vioxx°, pas de Mediator°, pas de pilules plus dangereuses que les autres, pas de gliptines ou de glitazones dans le diabète, pas d’antialzheimers, pas de statines en prévention primaire, pas de neuroleptiques diabétogènes, pas d’anticoagulants dénués d’antidote. Tout va bien, on vous dit.

Au lieu d’avaler des couleuvres pharmaceutiques assaisonnées par les dealers d’opinions hospitalo-universitaires, en essayant de se convaincre qu’elles sont digestes pour passer leurs examens, nourrir leur carrière ou leur ego, les rares étudiants et enseignants connaissant l’influence délétère des firmes pour les soins aux patients feraient mieux de se battre pour proposer de tels enseignements dans leurs facultés – Relire l’article de Philippe Masquelier : Indépendance de la formation et formation à l’indépendance – . Au Formindep on sait qu’agir dans ce but permet d’éviter des accidents et des décès. Ça a du sens pour un soignant, non ?