Conflits d’intérêts des professionnels de santé: appliquer enfin la loi!

L’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, à l’initiative de son directeur général Martin Hirsch, a publié le 29 mars un rapport d’état des lieux et de propositions pour lutter contre les conflits d’intérêts au sein de l’institution.
Les constats du rapport sont alarmants, à savoir une situation dans laquelle les visiteurs médicaux font partie des murs des hôpitaux, les avantages en nature (repas, congrès) sont banalisés, les liens d’intérêts ubiquitaires.
Pour une centaine de personnels hospitalo-universitaires parisiens, les contrats (conseil, orateur) au service des firmes de santé tels que déclarés auprès de l’ordre des médecins ont représenté pour chacun d’entre eux en 2015 plus de 50.000 € d’honoraires (hors avantages). Seul le cumul d’activités à titre « accessoire » est permis aux agents publics. De tels niveaux de rémunération interrogent sur la légalité de tels contrats.
S’agissant de personnels hospitalo-universitaires, ces liens ont de surcroît une influence directe sur la formation des futur.e.s soignant.e.s. Rappelons que 20% des futurs médecins sont formés dans l’un des hôpitaux de l’AP-HP, en lien avec 7 facultés. Or ces étudiant.e.s sont exposé.e.s à l’hôpital à une intense activité promotionnelle. Selon une étude auprès des internes en cardiolo-gie, les internes voient 7 visiteurs médicaux par mois en moyenne et 97% d’entre eux portent dans leur blouse un article promotionnel.
Tous ces liens, qu’ils soient minimes ou majeurs, ont pour effet démontré – souvent pour finalité – d’influencer l’expertise sanitaire, la recherche, la formation des soignants et les soins donnés aux patients. Ils constituent un véritable risque sanitaire.
Les signataires saluent la prise de conscience de l’AP-HP et appellent les hôpitaux et facultés français à s’emparer à leur tour du sujet, à l’instar des hôpitaux et facultés états-uniens qui disposent aujourd’hui de politiques cohérentes de prévention des conflits d’intérêts. L’ANEMF et le Formindep recensent actuellement les politiques des facultés françaises en la matière.
Les pouvoirs publics doivent démontrer leur volonté de faire enfin appliquer la loi sur le cumul d’activités des fonctionnaires, la loi DMOS (anti-cadeaux), et la loi de transparence, et soutenir les efforts de l’AP-HP en ce sens.
Ainsi que l’a rappelé la Cour des Comptes dans son rapport du 23 mars 2016, il est impératif que le Ministère de la Santé publie sans plus de délai les décrets et arrêtés permettant l’application pleine et entière des lois en matière de transparence et contrôle des liens d’intérêts, et ce rétroactivement à compter du 01/01/2012 comme l’a exigé le Conseil d’État.

Les signataires

 

  • L’association Formindep a pour objet de défendre une médecine indépendante de tout autre intérêt que celui de la santé des personnes.
  • L’Association Nationale des Etudiants en Médecine de France (ANEMF) fédère 37 associations d’étudiants en médecine de France, elle a pour objet de défendre l’intérêt commun des étudiants en médecine.
  • Le Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG), syndicat indépendant, représente les jeunes médecins généralistes, de l’internat jusqu’aux 10 ans de leur installation.
  • Le Collectif Europe et Médicament (MiEF) fort de plus de 70 organisations appartenant aux quatre grandes familles d’acteurs de la santé : associations de consommateurs, associations de patients et usagers, organismes d’assurance maladie, associations de professionnels de santé, réaffirme que le médicament n’est pas une marchandise comme une autre et que l’Europe est une opportunité pour tous ses citoyens de pouvoir disposer, dans ce domaine, des meilleures garanties en termes d’efficacité, de sécurité et de prix.
  • La CADUS (Conseil Aide & Défense des Usagers de la Santé) informe, accompagne et représente les usagers victimes d’accidents médicaux.
  • Le Comité de Liaison des Associations de Iatrogénies Médicamenteuses (CLAIM) réunit 5 associations de victimes, et œuvre pour une révision de la loi permettant l’indemnisation de ces victimes d’aléa thérapeutiques.
  • La Troupe du RIRE est un collectif d’étudiant.e.s en médecine ayant pour objectif de se réapproprier leurs études par le biais de la formation par les pairs. Elle a notamment adapté le manuel de l’OMS « Comprendre la promotion pharmaceutique et y répondre » (publié en 2009, traduit pour la HAS en 2013) sous la forme d’un livret pouvant rentrer dans une blouse. Intitulé « Pourquoi garder son indépendance face aux laboratoires pharmaceutiques » ce livret a reçu le Prix Prescrire 2015 et a été déjà diffusé à plus de 10.000 exemplaires.

Contacts

Formindep : media@formindep.org
ANEMF : Sébastien FOUCHER, Président – president@anemf.org
SNJMG : Dr. Émilie FRELAT, Présidente – presidente@snjmg.org
CLAIM : Sophie LE PALLEC sophielle@gmail.com
CADUS : Jacqueline HOUDAYER cadus.fr
Collectif Europe et Médicament : Pierre CHIRAC Pierre.Chirac@aol.com
La Troupe du RIRE : latroupedurire@mailoo.org

version pdf : communiqué soutien AP-HP