L’usine pharmaceutique Roussel-Uclaf de Romainville dans la région parisienne racontée par ses ouvriers, chercheurs, syndicalistes de 1967 à 2007. Un ouvrage passionnant qui explique de l’intérieur et vu d’en bas, c’est à dire de ses travailleurs, comment l’industrie pharmaceutique est passée d’une culture de santé publique et de recherche, à une culture de profit et de retour sur investissement à tout prix, qui a amené à sacrifier des médicaments utiles aux patients mais estimés non rentables pour les actionnaires. Comprendre, raconté par ses ouvriers et ouvrières, comment au début des années 90 le marketing a pris le pouvoir sur la recherche, de façon délibérée et calculée, est vraiment éclairant. Pour ceux qui s’intéressent à l’histoire industrielle et économique, on voit le glissement d’un capitalisme français de patrimoine familial, à un capitalisme anglo-saxon de profit et d’actionnariat. On retrouve exactement le même phénomène dans le textile. Sur ce fond économique et industriel se déroule la vie des ouvriers et des syndicalistes de Roussel-Uclaf, avec leurs joies, leurs peines et surtout leurs combats, et des instants de profonde émotion. On y redécouvre la fierté des travailleurs de l’industrie pharmaceutique de contribuer à la santé publique et au bien-être de l’humanité, et leur colère quand ils comprennent les véritables objectifs des décideurs, des actionnaires, et comment ils sont ainsi, eux aussi, trompés et manipulés. La véritable histoire du RU 486, la pilule “contragestive”, racontée par le personnel du laboratoire de recherche est également passionnante. De Roussel-Uclaf à Sanofi-Aventis, on lit enfin la vie et la mort d’une usine, rebaptisée site, puis pôle, et ces glissements de vocabulaire ne sont pas innocents.
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