À l’heure où la désinformation menace la santé publique, l’honnêteté des informations médicales est plus que jamais cruciale.
L’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) est de plus en plus interpellée sur la question de l’honnêteté de l’information diffusée dans les médias. Alors que les émissions médicales jouent un rôle essentiel dans l’éducation du public, les préoccupations liées à la transparence et aux conflits d’intérêts des intervenants sont de plus en plus pressantes.
Dans le cadre de l’émission « Enquête de Santé », diffusée sur France 5 en février 2023, plusieurs médecins psychiatres ont été invités à discuter des antidépresseurs. Cependant, ces intervenants n’ont pas annoncé leurs liens avec les entreprises commercialisant des produits à finalité sanitaire, comme le font la majorité d’entre eux.
Le détail des montants perçus par les médecins concernés (Source : Transparence Santé) sont facilement accessibles sur eurosfordocs. De 2019 à 2023, les montants déclarés sont :
- Dr GF, psychiatre, 18 300€, principalement pour des contrats d’expert scientifique et des contrats d’intervention à une manifestation
- Dr JB, psychiatre, 14 900€, principalement pour des contrats d’intervention à une manifestation et pour des contrats de conseil ou d’expertise autre que scientifique
- Dr CB, psychiatre, 128 € pour hospitalité-restauration
Ces montants soulèvent des questions cruciales concernant l’objectivité des informations délivrées lors de l’émission. Il ne s’agit pas de cibler ces médecins ou cette émission en particulier, mais plutôt de souligner l’importance de l’honnêteté et de la transparence dans l’ensemble des médias.
Un Manque de Transparence Inquiétant
Alerté par le FORMINDEP (lien), L’ARCOM a déclaré que l’absence de mention de noms spécifiques d’antidépresseurs dans l’émission ne remettait pas en cause l’honnêteté de l’information. Toutefois, cette position soulève de sérieuses interrogations sur l’impact de telles pratiques sur la qualité de l’information médicale.
Il est préoccupant de constater que les médecins intervenants ont été largement rémunérés par l’industrie pharmaceutique, ce qui pourrait influencer leur discours et les recommandations faites aux téléspectateurs. En omettant de divulguer ces informations cruciales, l’ARCOM et les intervenants contribuent à une désinformation qui peut nuire aux patients.
Honnêteté et Transparence
L’absence de références à des marques ou laboratoires peut donner une fausse impression de neutralité, masquant ainsi des conflits d’intérêts potentiellement préjudiciables. Les experts de la santé et les médias ont la responsabilité de fournir des informations précises et équilibrées, fondées sur des données probantes. Une communication transparente sur les conflits d’intérêts est essentielle pour instaurer la confiance du public.
Une loi et un décret obligent les professionnels de la santé à annoncer leur conflits d’intérêts lors de la prise de parole en public, quelque soit le média (art. L4113-13 et art. R4113-110 du Code de Santé Publique). Mais les sanctions par le Conseil de l’Ordre sont exceptionnelles.
Appel à la Responsabilité
Les journalistes jouent un rôle primordial dans la diffusion d’informations médicales précises et fiables. Il est essentiel que les intervenants soient invités à divulguer leurs liens financiers avec des firmes pharmaceutiques avant de s’exprimer publiquement. Malheureusement, cette pratique n’est quasiment jamais respectée. Pourquoi ? Les journalistes interrogés à ce sujet évoquent souvent une crainte de voir leurs invités refuser de participer à l’émission.
Cette situation place les journalistes dans une position délicate, où ils se retrouvent piégés entre la nécessité d’informer le public et la peur de compromettre leurs interviews. En ne divulguant pas ces informations, les médias compromettent la qualité et la transparence de l’information fournie au public. Le public mérite de savoir si les recommandations qu’il entend sont influencées par des intérêts financiers.
C’est pourquoi nous appelons l’ARCOM à instaurer des directives strictes pour la divulgation des conflits d’intérêts. Il est impératif que tous les professionnels de santé intervenant dans les médias soient tenus de déclarer tout lien financier avec l’industrie pharmaceutique. Cela garantirait non seulement une communication honnête et transparente sur les questions de santé, mais renforcerait également la confiance du public dans les informations médicales diffusées.
Ces directives contribueraient à atteindre les objectifs stratégiques 2023-2025 de l’ARCOM, qui stipulent notamment la nécessité de “veiller à une information fiable et indépendante” (Objectif 1, Action 5).
Pourquoi la Transparence Est Essentielle
- Protection du Public : La divulgation des conflits d’intérêts permet au public de faire des choix éclairés sur sa santé.
- Renforcement de la Crédibilité : La transparence dans les relations financières aide à restaurer, en partie, la confiance envers les professionnels de santé et les médias.
- Promotion d’une Éthique Professionnelle : Les professionnels de santé doivent se sentir responsables de l’impact de leurs recommandations sur la santé publique.
En fin de compte, il est de notre devoir collectif de garantir que l’information médicale soit fondée sur des faits et non influencée par des intérêts personnels. Ensemble, nous pouvons faire pression sur les régulateurs et les médias pour qu’ils adoptent des normes éthiques plus strictes, afin de protéger la santé de chacun.
Une Initiative pour la Transparence
Nous encourageons également le public à se montrer vigilant face à l’information médicale diffusée. Les citoyens ont le droit de connaître les intérêts qui pourraient influencer les conseils de santé qu’ils reçoivent. En ce sens, nous appelons les professionnels de santé et les médias à faire preuve d’une rigueur exemplaire dans leurs communication.
Pour préserver la santé publique et la crédibilité des médias de santé, il est impératif que ces questions soient traitées avec rigueur. Ensemble, œuvrons pour une information médicale fiable et transparente, libre de tout conflit d’intérêts.
Courrier reçu de l’ARCOM : lien
Pour annoncer à l’ARCOM des programmes ne respectant pas l’honnêteté et la transparence de l’information : Comment faire ?
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