Les aliments ultra-transformés (AUT), ou Ultra-Processed Foods (UPF), sont désormais reconnus comme un enjeu majeur de santé publique. Une nouvelle série d’articles publiée dans la revue médicale The Lancet, à laquelle participe notre membre, Dr Mélissa Mialon, analyse en profondeur leurs impacts sur la santé et le rôle de l’industrie qui les produit.

Le Formindep s’est déjà joint à un appel collectif dénonçant l’influence des industriels sur la santé du nourrisson et l’allaitement. Nous en avions détaillé les enjeux dans notre article « Allergies alimentaires et protection de l’allaitement ».

Les aliments ultra-transformés, de quoi parle-t-on ?

Les aliments ultra-transformés sont des produits industriels qui contiennent des marqueurs d’ultra-transformation, comme :

  • des ingrédients rarement utilisés en cuisine (amidon modifié, isolats de protéines, etc.),
  • des additifs technologiques destinés à améliorer la texture, la saveur ou la conservation (émulsifiants, colorants, édulcorants, exhausteurs de goût, etc.),
  • une transformation mécanique et/ou chimique intensive.

Selon la classification Nova, les aliments ultra-transformés constituent un groupe distinct, à différencier clairement :

  • des produits bruts,
  • des ingrédients culinaires (huile, aromates, etc.),
  • et des aliments simplement transformés (ex. : pain traditionnel, légumes en conserve sans additifs complexes, etc.).

En pratique, de nombreux produits de grande distribution (plats préparés, snacks, céréales du petit-déjeuner, desserts lactés, substituts de repas…) entrent dans la catégorie des aliments ultra-transformés.

Auteurs de la série Lancet sur les aliments ultra-transformés

Auteurs de la série Lancet sur les aliments ultra-transformés

Aliments ultra-transformés : ce que révèle la nouvelle série du Lancet

Ce que montre la série du Lancet sur les aliments ultra-transformés

Trois messages clés émergent de cette série.

1. Un lien cohérent entre consommation d’AUT et risques pour la santé

La première étude présentée montre une association entre une consommation élevée d’aliments ultra-transformés et diabète de type 2, maladies cardiovasculaires, certains cancers, dépression et l’anxiété, et une mortalité accrue toutes causes confondues.

Point important : le Lancet souligne que ces risques ne s’expliquent pas uniquement par la densité calorique, le sucre ou les graisses. Le degré de transformation lui-même semble jouer un rôle spécifique dans les effets délétères observés.

2. Des pistes d’action pour les pouvoirs publics

La seconde étude de la série du Lancet appelle à des mesures de santé publique pour réduire l’exposition aux aliments ultra-transformés, notamment :

  • une réglementation plus stricte du marketing des AUT (en particulier auprès des enfants),
  • une augmentation des taxes sur les produits ultra-transformés,
  • une meilleure information du public sur les risques associés à ces aliments,
  • des politiques qui encouragent la production, l’accessibilité et la consommation d’aliments peu transformés.

3. Le poids déterminant de l’industrie des aliments ultra-transformés

La troisième publication déplace le regard : il ne s’agit plus seulement des “choix individuels” des consommateurs, mais du pouvoir de l’industrie de l’alimentation ultra-transformée. Les auteurs montrent que ce sont principalement les stratégies industrielles qui ont rendu les AUT omniprésents, y compris via :

  • du marketing agressif, notamment ciblant les enfants,
  • du lobbying politique pour influencer les lois et réglementations,
  • du financement de recherches susceptibles de minimiser les risques ou de créer du doute.

Ce constat contredit l’idée que la surconsommation d’aliments ultra-transformés serait la conséquence de préférences individuelles.

Les incitations économiques et les stratégies des géants de l’agroalimentaire structurent les environnements alimentaires et favorisent l’essor mondial des AUT.

La série insiste donc sur la nécessité de mesures collectives, ambitieuses et parfois contraignantes pour limiter l’influence des industriels dans la décision publique et soutenir des systèmes alimentaires locaux, durables et moins dépendants des aliments ultra-transformés.

Réduire la place des AUT devient un enjeu de souveraineté sanitaire et démocratique : la santé des populations doit primer sur les intérêts économiques des industriels.

Pour aller plus loin

Dans un second article, nous analyserons ce que ces constats changent pour les professionnel·les de santé : comment préserver leur indépendance, comment conseiller les patients, et comment agir à l’échelle collective.