On a lu…
RÉSISTER A LA CORRUPTION, par Elise Van Beneden et Eric Alt (Ed Tracts-Gallimard, 3,90 euros)
Les deux auteurs sont présidente et vice-président d’ANTICOR, association de lutte contre la corruption créée en 2002 ; leur opuscule, 60 pages, dresse un tableau fouillé de toutes les formes de corruption, et décline des propositions pour la combattre.
La corruption des acteurs publics existe-t-elle vraiment, dans un pays protégé par la Déclaration des Droits de l’Homme et la Charte des droits de l’UE ? Les deux auteurs donnent un grand nombre d’exemples récents : fraude à la commande publique, corruption directe d’agents publics par sollicitation ou acceptation de liens financiers, évitement de l’impôt, emplois fictifs, refus de se déporter en situation de liens d’intérêts, etc.
Le lobbying, intense et très médiocrement encadré, des entreprises et de leurs représentants, l’absence de contrôle a priori des décisions publiques, le financement des campagnes électorales par l’argent privé, les allers-retours des hauts fonctionnaires entre le public et le privé, et surtout le manque de transparence cultivé par les élus et acteurs publics, permettent à ces situations de prospérer et se reproduire, et donnent des élus et des acteurs institutionnels une image très dégradée.
Il existe, en théorie, des armes contre la corruption, mais leur usage reste limité par de nombreux obstacles. L’évolution législative récente se heurte parfois aux liens anachroniques des procureurs avec le pouvoir politique dont ils sont l’émanation, à la pénurie d’effectifs du parquet, au fonctionnement étonnant de la justice commerciale ; et chaque avancée législative se voit contrée par un recul (simplification de la procédure des marchés publics dans des situations d’intérêt général, introduction du « secret des affaires »…) ; malgré la création de la CADA, l’accès aux documents administratifs demeure un chemin de croix ; les autorités compétentes en ce domaine (HATVP, AFA, CNCPFP…) disposent de peu de moyens, et les sanctions restent limitées ; la possibilité d’agir en justice pour certaines associations, un contre-pouvoir important, est limitée par la procédure d’agrément, dont ANTICOR a bien failli faire les frais ; la protection des lanceurs d’alerte, qui ont permis la révélation de bien des affaires, demeure encore un rêve lointain.
Il y a donc là un combat citoyen : rendre aux citoyens un pouvoir confisqué, mais aussi en même temps agir contre le discrédit de la classe politique.
ANTICOR a été créée à l’initiative de magistrats et de juristes, mais a élargi désormais sa base d’adhérents ; l’association est partie prenante actuellement de nombre de procédures judiciaires dans ce domaine. Par ailleurs, les auteurs font quelques propositions concrètes : création d’une autorité de la probité, inscrite dans la constitution et indépendante, réhabilitation de la démocratie participative (avec la proposition de référendums d’initiative citoyenne).
Conflit d’intérêt n’est certes pas corruption ; mais on l’aura compris, le combat du FORMINDEP pour une formation des soignants et une information indépendantes de tout intérêt autre que celui des patients et des citoyens, rejoint celui d’ANTICOR sur bien des points, nous participons d’ailleurs à des initiatives et procédures communes, et nous avons tous deux certainement intérêt à des échanges réguliers.
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